Du National, vous savez probablement déjà tout, quand bien même vous n’y auriez jamais mis les pieds (et vous auriez bien tort!…) : parce que depuis plus de vingt ans, il ne se passe pas une saison sans qu’un article de presse ne rappelle ce lieu à nos mémoire.
Invariablement, vous aurez lu ou entendu parler d’un «resto branché», de «sa terrasse magnifique» et de sa «cuisine inventive». Voilà pour la surface. N’en rajoutons pas ! Nous allons plutôt vous expliquer pourquoi cet endroit nous fait du bien et nous inspire. Et comme c’est une longue histoire, la voici en pointillé :
Un lieu de persévérance et de résistance Promis à la démolition, l’immeuble a été acheté dans tes années nonante par quelques esprits courageux, décidés à remettre debout l’édifice prêt à s’écrouler. Leur projet consistait à créer, sous forme de coopérative, des appartements pour y loger leurs familles, tout en gardant le rez-de-chaussée ouvert au public. N’ayant aucune expérience dans la restauration, ils imaginaient servir aux quelques amis de passage des petits en-cas modestes, cuisinés par leurs soins: des tapas, des tartines et des grillades en été. Tout comme à la maison…
Mais avant tout, il fallait entreprendre des travaux. Les deux propriétaires ayant des compétences dans Ies métiers du bâtiment ont tenu le choc, les autres ont rapidement jeté l’éponge. On Te comprend aisément vu l’ampleur du chantier: du sous-sol à la toiture, tout a été vidé, consolidé, démoli et reconstruit, en prenant soin de conserver et de rénover tous les éléments d’architecture qui tenaient encore debout. Rien d’exceptionnel, me direz-vous. C’est bien ainsi que l’on rénove tes vieilles maisons. L’incroyable se situe ici : disposant d’un budget d’une modestie frôlant l’inconscience, ils ont fait tout ça eux-mêmes. Un chantier monumental, tenu à bout de bras par de jeunes gars, soutenus par quelques coups de mains de leurs compagnes, de leurs amis et de leurs familles. Pensez-y la prochaine fois que vous irez y boire un verre (ou y manger un truc délicieux) ! Tout ce que vous voyez, c’est eux qui l’ont construit…
Revenons au projet «tartines et tapas pour les copains». Comme vous l’aurez certainement deviné, cela ne s’est pas du tout passé comme prévu: dès l’ouverture, la clientèle a afflué en masse. C’était l’été, l’établissement débordait d’une foule compacte, impossible à rassasier. Quelques semaines plus tard, il a fallu tout recommencer: fermer le restaurant, construire une cuisine, agrandir le bar, acheter du matériel, engager du personnel… et apprendre à devenir restaurateurs: Ils l’ont fait. Et comme si cela ne suffisait pas, ils ont développé une offre culturelle foisonnante (la liste des concerts, projections et événements fabuleux organisés au National est trop longue pour la rapporter ici). Et comme si cela ne suffisait toujours pas, ils ont transformé la cave en un remuant petit club (Le Sauna Club), amélioré leurs infrastructures, agrandi et décoré l’ensemble avec goût, humour et malice. Et comme rien ne les arrête, ils ont bravé toutes les incohérences administratives et se sont dressés contres toutes les interprétations non-sensiques des règlements communaux et cantonaux qu’opposaient les autorités à leurs projets.
Car si vous imaginez que rénover un immeuble, créer un lieu public, une offre culturelle et des emplois suffit à éveiller la bienveillance des pouvoirs publics, vous vous trompez lourdement.
Les gens
Parlons maintenant de l’essentiel : ce lieu déborde de vie. Du matin au soir se succèdent une foule de visages de partout et de tous âges, heureux de partager du bon temps. La musique les accompagne et les discussions fusent dans toutes les langues. Le voici, notre Esprit National !
Nous résistons ici à l’envie de nommer les artisans de ce miracle : ils n’aiment pas trop que l’on parle d’eux. Nous nous contenterons donc de saluer l’ensemble de leurs équipes, en les remerciant de leur travail et de leur bon accueil. Désormais, vous comprendrez certainement pourquoi il faut prendre très au sérieux celles et ceux qui disent de cet endroit qu’il a une âme: parce que tout y est fait avec attention et intention, avec soin et respect.
Mais rien n’est vraiment surprenant dans cette histoire : la terrasse du National est abritée par un immense et majestueux Cèdre du Liban. Et devinez quoi ? Cet arbre est un emblème de grandeur, de noblesse, de force, de pérennité et d’incorruptibilité. Et contrairement à beaucoup d’autres, il ne pourrit pas. Il n’y a pas de hasard…